Chant d’un fantassin
A André Bacque
Je voudrais être un vieillard
Que j’ai vu sur une route ;
Assis par terre au soleil
Il cassait des cailloux blancs
Entre ses jambes ouvertes.On ne lui demandait rien
Que son travail solitaire.
Quand midi flambait les blés,
Il mangeait son pain à l’ombre.Je connais dans un ravin
Obstrué par les feuillages
Une carrière ignorée
Où nul sentier ne conduit.La lumière y est furtive
Et aussi la douce pluie ;
Et un seul oiseau parfois
Interroge le silence.C’est une blessure ancienne,
Étroite, courbe et profonde
Oubliée même du ciel ;Sous la viorne et sous la ronce
J’y voudrais vivre blotti.Je voudrais être l’aveugle
Sous le porche de l’église :Dans sa nuit sonore il chante !
Il accueille tout entier
Le temps qui circule en lui
Comme un air pur sous des voûtes.Car il est l’heureuse épave
Tirée hors du morne fleuve
Qui ne peut plus la rouler
Dans sa haine et dans sa fange.Je voudrais avoir été
Le premier soldat tombé
Le premier jour de la guerre.
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Charles VILDRAC
Charles Vildrac, né Charles Messager le 22 novembre 1882 dans le 5e arrondissement de Paris et mort le 25 juin 1971 à Saint-Tropez, est un poète et dramaturge français. Il fonda avec Georges Duhamel le groupe de l’Abbaye, une expérience communautaire en bord de Marne ouverte aux artistes (1906-1908). Charles Vildrac naît au... [Lire la suite]
Chant d’un plumitif
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Je voudrais être un guépard
Courant après les gazelles ;
Je voudrais être un busard
Capturant les hirondelles.
Sans penser, mordre la chair
Où la vie tremble et palpite,
Se cacher dans le désert,
Sans devenir un ermite.
Je voudrais vivre de rien
Ou presque, dans un coin sombre,
Ignorant le mal, le bien
Et leurs nuances sans nombre.
Sans penser, boire de l’eau
Provenant d’une fontaine
Où se baignent les oiseaux
Dont l’âme est toujours sereine.
Je voudrais, dans un chalet,
Passer le jour à écrire
Auprès des monts du Valais,
Qui dans un grand lac se mirent.
Sans penser, tracer des mots
D’une écriture bien ronde,
Inventer des animaux,
Inventer un nouveau monde.
J'aimerais, dans ce chalet,
Passer la nuit à écrire
On formerait 1 ballet
De tous nos sonnets, sans nuire.
J'aime j'aime merci