Chanson sur l’air des Landriry
Voici l’automne revenu,
Nos anges, sur un air connu,
Landrirette,
Arrivent toutes à Paris,
Landriry.Ces dames, au retour des champs,
Auront les yeux clairs et méchants,
Landrirette,
Le sein rose et le teint fleuri,
Landriry.Mais celles qui n’ont pas quitté
La capitale pour l’été,
Landrirette,
Ont l’air bien triste et bien marri,
Landriry.Nos Aspasie et nos Sontag
Se promènent au Ranelagh,
Landrirette,
Tristes comme un bonnet de nuit,
Landriry.Elles ont vu fort tristement
La clôture du parlement,
Landrirette,
Leurs roses tournent en soucis,
Landriry.Il est temps que plus d’un banquier
Quitte le Havre ou Villequier,
Landrirette,
Car notre Pactole est tari,
Landriry.Frison, Naïs et Brancador
Ont engagé leurs colliers d’or,
Landrirette,
Et Souris n’a plus de mari,
Landriry.Mais voici le temps des moineaux ;
Les vacances des tribunaux,
Landrirette,
Vont ramener l’argent ici,
Landriry.Car déjà, sur le boulevard,
On voit des habits de Stuttgard,
Landrirette,
Et des vestes de Clamecy,
Landriry.Tout cela vient avec l’espoir
D’aller à Mabille et de voir,
Landrirette,
Page et Mademoiselle Ozy,
Landriry.Le matin, avec bonne foi,
Ils tombent au café de Foy,
Landrirette,
Pour lire Le Charivari,
Landriry.Puis ils s’en vont, à leur grand dam,
Acquérir sur la foi de Cham,
Landrirette,
Des jaquettes gris de souris,
Landriry.Un Moulinois de mes cousins
Contemple tous les magasins,
Landrirette,
Avec un sourire ébahi,
Landriry.Et déjà ce nouvel Hassan
Guigne un cachemire au Persan,
Landrirette,
C’est pour charmer quelque péri,
Landriry.Il ira ce soir à Feydeau.
Avant le lever du rideau,
Landrirette,
Il s’écriera : « C’est du Grétry,
Landriry ! »Courage, Amours, souvent frôlés !
Demain, les bijoux contrôlés,
Landrirette,
Se placeront à juste prix,
Landriry.Bon appétit, jeunes beautés,
Qu’adorent les prêtres bottés,
Landrirette,
De Cypris et de Brididi,
Landriry.Vous allez guérir derechef
Par l’or et le papier Joseph,
Landrirette,
Vos roses et vos lys flétris,
Landriry.Si vous savez d’un air vainqueur
Mettre sur votre bouche en cœur,
Landrirette,
Les jeux, les ris et les souris,
Landriry.Si vous savez, à chaque pas,
Murmurer : « Je ne polke pas, »
Landrirette,
Vous allez gagner vos paris,
Landriry.Vous allez avoir des pompons,
Des fleurettes et des jupons,
Landrirette,
Comme en portait la Dubarry,
Landriry.Vous aurez, comme en un sérail,
Plus de perles et de corail,
Landrirette,
Qu’un marchand de Pondichéry,
Landriry.Plus d’étoiles en diamant
Qu’il ne s’en trouve au firmament,
Landrirette,
Ou dans un roman de Méry,
Landriry.Et cet hiver à l’Opéra,
Où quelque Amadis vous paiera,
Landrirette,
Vous poserez pour Gavarni,
Landriry.
Septembre 1846.
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Etienne Jean Baptiste Claude Théodore Faullain de Banville, né le 14 mars 1823 à Moulins (Allier) et mort le 13 mars 1891 à Paris, est un poète, dramaturge et critique français. Célèbre pour les « Odes funambulesques » et « les Exilés », il est surnommé « le poète du... [Lire la suite]
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