Poème 'Bouche usée' de Paul ÉLUARD dans 'Mourir de ne pas mourir'

Bouche usée

Paul ÉLUARD
Recueil : "Mourir de ne pas mourir"

Le rire tenait sa bouteille
À la bouche riait la mort
Dans tous les lites où l’on dort
Le ciel sous tous les corps sommeille

Un clair ruban vert à l’oreille
Trois boules une bague en or
Elle porte sans effort
Une ombre aux lumières pareille

Petite étoile des vapeurs
Au soir des mers sans voyageurs
Des mers que le ciel cruel fouille

Délices portées à la main
Plus douce poussière à la fin
Les branches perdues sous la rouille.

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Commentaires

  1. Le barde offre à sa muse un peu d'une bouteille,
    Il trinque à la santé de tous ses copains morts ;
    Pour cela, pas très tard, notre muse s'endort
    Et le barde, lui-même, à sa table sommeille.

    Les propos des buveurs amusent ses oreilles ;
    Il leur dit : « Compagnons, ce soir vous parlez d'or. »
    Leur esprit, cependant, n'est pas plein à ras bord,
    Proposant, chaque soir, des histoires pareilles.

    Dans l'auberge envahie par les sombres vapeurs
    Des alcools que le bar propose aux voyageurs,
    Cherchant l'inspiration, le barde creuse et fouille,

    Les feuilles de papier noircissent sous sa main
    (À moins que ce ne soient des bouts de parchemin) ;
    Sa plume, à grands efforts, d'un vers se dépatouille.

  2. Le rire tenait sa bouteille,
    A la bouche riait la mort!!!

  3. Ce poème est vraiment admirable

  4. Dive bouteille
    --------

    Le sang du Fils de Dieu consacré sur l’autel,
    Il ne s’agit pas là d’un sombre sortilège ;
    La belle âme du prêtre est plus blanche que neige,
    Sauf quelques exceptions, mais c’est accidentel.

    En bouteille est le vin du commun des mortels,
    En avaler souvent n’est pas un sacrilège ;
    Nous le prenons par droit, et non par privilège,
    Dans une humble taverne ou dans un grand hôtel.

    Les avenants comptoirs sont de zinc ou de marbre ;
    Tu peux aussi t’asseoir à l’ombre d’un bel arbre,
    Oubliant en ce lieu la ville et son raffut.

    Bacchus fut bien souvent célébré sous ma plume ;
    De mes prédécesseurs c’est aussi la coutume,
    Et du bon Rabelais s’adossant à son fût.

  5. Cellier de Socrate
    ----------

    Douze amphores, dans ma demeure,
    Celles que m’offrit ma moitié ;
    Mieux vaut faire envie que pitié,
    Ils ne boivent plus, ceux qui meurent.

    Qui peut savoir quand viendra l’heure
    De prendre congé du cellier ?
    Deuil d’un agneau, deuil d’un bélier,
    Dans les deux cas la brebis pleure.

    Chassons maintenant le souci
    Car les dieux ne sont pas sévères ;
    Ils savent bien trinquer aussi.

    (Socrate ainsi s’est exprimé,
    C’est dans ma mémoire imprimé ;
    Tout comme lui je persévère.)

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Paul ÉLUARD

Portait de Paul ÉLUARD

Paul Éluard, de son vrai nom Eugène Émile Paul Grindel (14 décembre 1895 à Saint-Denis – 18 novembre 1952 à Charenton-le-Pont ), est un poète français. C’est à l’âge de vingt et un ans qu’il choisit le nom de Paul Éluard, hérité de sa grand-mère, Félicie. Il adhère au dadaïsme et est l’un des... [Lire la suite]

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