Poème 'Blason céleste' de José-Maria de HEREDIA dans 'Les Trophées'

Blason céleste

José-Maria de HEREDIA
Recueil : "Les Trophées"

J’ai vu parfois, ayant tout l’azur pour émail,
Les nuages d’argent et de pourpre et de cuivre,
A l’Occident où l’oeil s’éblouit à les suivre,
Peindre d’un grand blason le céleste vitrail.

Pour cimier, pour supports, l’héraldique bétail,
Licorne, léopard, alérion ou guivre,
Monstres, géants captifs qu’un coup de vent délivre,
Exhaussent leur stature et cabrent leur poitrail.

Certe, aux champs de l’espace, en ces combats étranges
Que les noirs Séraphins livrèrent aux Archanges,
Cet écu fut gagné par un Baron du ciel ;

Comme ceux qui jadis prirent Constantinople,
Il porte, en bon croisé, qu’il soit George ou Michel
Le soleil, besant d’or, sur la mer de sinople.

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Commentaires

  1. Splendeur des blasons
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    Chandelle de sinople, incomparable émail,
    Ornant de tes reflets le robinet de cuivre,
    Au pays des blasons ma plume te veut suivre !
    Tu seras le sujet d'un magique vitrail

    Où se promènera le magique bétail :
    De sable un crocolion, de platine une vouivre,
    D'argent un gidouillon, d'orange un rhapsode ivre,
    Plus une basilique avec son grand portail.

    Le soleil, traversant cette verrièrel étrange,
    Fera sur mon bureau danser quelques archanges,
    Comme s'ils désiraient se disputer le ciel,

    Comme rivalisant auprès de leurs disciples,
    Comme voulant piquer son trône à Saint Michel,
    Ou pour (car c'est dimanche) amuser le dieu triple.

  2. Ambiporc d’azur
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    Je suis l’ambicochon, vêtu d’un noble émail,
    Je n’ai pour tout trésor que des pièces de cuivre;
    Où sont les songes bleus que j’aimais tant poursuivre?
    Fourbus de lassitude, ils dorment au bercail.

    Une reine jadis admira mon travail,
    Qui, je ne sais pourquoi, s’est transformée en vouivre;
    Le roi me tutoyait quand il était bien ivre,
    Puis me reconduisait jusqu’à son grand portail.

    Je sais qu’au bout d’un temps la vie devient étrange,
    Que ce soit pour un porc ou bien pour un archange;
    Je n’ai pas d’opinion sur les décrets du Ciel.

    Je termine mes jours sans maître et sans disciple,
    Et je ne marche plus vers le pont Saint Michel,
    Mais ces nouveaux quartiers ont des splendeurs multiples.

  3. Baron céleste
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    Je traverse le ciel, vêtu d’un gros chandail,
    Car trop lourde serait mon amure de cuivre ;
    Un nuage véloce, et que j’aime poursuivre,
    Au long d’un clair matin m’éloigne du bercail.

    Je suis un aristo, j’échappe à tout travail,
    Définitivement ce statut m’en délivre ;
    Je feuillette, le soir, tranquillement, des livres,
    Assis sur une pierre, auprès de mon portail.

    Un grand seigneur qui vole, est-ce une chose étrange ?
    Je dois probablement être cousin des anges,
    Ou filleul d’un d’entre eux, (je m’appelle Michel).

    Mon voisin le marquis, jadis mon condisciple,
    Dit que sorcière fut ma grand-tante Rachel
    Et que je suis moi-même ennemi du dieu triple...

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José-Maria de HEREDIA

Portait de José-Maria de HEREDIA

José-Maria de Heredia (né José María de Heredia Girard 1842-1905) est un homme de lettres d’origine cubaine, naturalisé français en 1893. En tant que poète, c’est un des maîtres du mouvement parnassien, véritable joaillier du vers. Son œuvre poétique est constituée d’un unique recueil, « Les... [Lire la suite]

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