Au Roi sur son retour du Languedoc
Jeune et victorieux monarque
Dont les exploits si glorieux
Ont donné de l’envie aux dieux.
Et de la frayeur à la Parque,
Qu’attendez-vous plus des destins?
C’est assez puni de mutins,
C’est assez démoli de villes,
Nous savons bien que désormais
La fureur des guerres civiles
Ne nous saurait ôter la paix.Laissez-là ces terres étranges
Où vous faites tant de déserts.
Boësset prépare des concerts,
Et moi des vers à vos louanges;
Paris ne fut jamais si beau,
Les sources de Fontainebleau,
Rompant leurs petits flots de verre
Contre les murs de leurs remparts,
Ne murmurent que de la guerre
Qui les prive de vos regards.Dans les allégresses publiques,
Même en célébrant vos vertus,
Nos visages sont abattus,
Et nos âmes mélancoliques.
Vos exploits qu’on nous fait ouïr
Ne peuvent, sans vous réjouir,
Vous donner de la renommée,
Et ne peuvent, sans nous fâcher,
Exposer au sort de l’armée
Un Roi que nous avons si cher.Dans ce sanglant métier des armes
Où vos bras sont trop exercés,
D’autant de sang que vous versez
Le peuple verse ici de larmes.
Le démon, ennemi du jour,
Noyant les astres de la Cour
Dans l’horreur de ses fleuves sombres,
Partage votre état aux morts,
Bâtit l’empire de ses ombres
De la ruine de nos corps.Si ses fureurs étaient hardies
A ce point que la cruauté
Attaquât votre Majesté
De leurs funestes maladies,
Quelle si secourable main
Peut fournir le secours humain,
Ou quelle assistance divine
Vous pourrait si soudain guérir,
Que la peur de notre ruine
Ne nous eût plutôt fait mourir?Revenez au sein de la France,
C’est où les astres les plus doux
Encore pour l’amour de vous
Adouciront leur influence.
Tous les plus gracieux climats,
Qui sans grêles et sans frimas
Peuvent accomplir leur année
Dans le plus favorable jour,
N’ont rien d’égal à la journée
De votre bienheureux retour.Votre démon tenant la guerre
Réduite à sa dévotion,
Laisse gronder l’ambition
Des plus vaillants rois de la terre;
On n’en voit point du temps passé
De qui le renom effacé
Ne vous rende un muet hommage,
Et le marbre devant vos lys
Est honteux de servir d’image
A leurs exploits ensevelis.
Poème préféré des membres
Aucun membre n'a ajouté ce poème parmi ses favoris.
Théophile de VIAU
Théophile de Viau, né entre mars et mai 1590 à Clairac et mort le 25 septembre 1626 à Paris, est un poète et dramaturge français. Poète le plus lu au XVIIe siècle, il sera oublié suite aux critiques des Classiques, avant d’être redécouvert par Théophile Gautier. Depuis le XXe siècle, Théophile de Viau est défini... [Lire la suite]
- Sur le ballet du Roi pour Monseigneur le duc...
- Maintenant que Cloris a juré de me plaire...
- Quand j'aurai ce contentement...
- Qui voudra pense à des empires...
- Pour Monseigneur le duc de Luynes. Apollon...
- Maintenant que Philis est morte...
- On n'avait point posé les fondements de...
- Épigramme - Je doute que ce fils...
- Me dois-je taire encore, Amour, quelle...
- Élégie. A Monsieur de Pezé
- Un berger prophète (5)
- D'un sommeil plus tranquille à mes amours... (5)
- L'autre jour, inspiré d'une divine flamme... (4)
- Un fier démon, qui me menace... (3)
- Épigramme - Grâce à ce comte libéral... (3)
- Au Roi (3)
- Au moins ai-je songé que je vous ai... (2)
- Ode au Prince d'Orange (2)
- Élégie à une dame (2)
- Vos rigueurs me pressaient d'une douleur si... (2)
Commentaires
Aucun commentaire
Rédiger un commentaire