À un Juvénal de lait
Incipe, parve puer, risu cognoscere…
À grands coups d’avirons de douze pieds, tu rames
En vers… et contre tout – Hommes, auvergnats, femmes. –
Tu n’as pas vu l’endroit et tu cherches l’envers.
Jeune renard en chasse… Ils sont trop verts – tes vers.C’est le vers solitaire. – On le purge. – Ces Dames
Sont le remède. Après tu feras de tes nerfs
Des cordes-à-boyau ; quand, guitares sans âmes,
Les vers te reviendront déchantés et soufferts.Hystérique à rebours, ta Muse est trop superbe,
Petit cochon de lait, qui n’as goûté qu’en herbe,
L’âcre saveur du fruit encore défendu.Plus tard, tu colleras sur papier tes pensées,
Fleurs d’herboriste, mais, autrefois ramassées…
Quand il faisait beau temps au paradis perdu.
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Tristan CORBIERE
Édouard-Joachim Corbière, dit Tristan Corbière, né le 18 juillet 1845 au manoir de Coat-Congar à Morlaix (Finistère) et mort le 1er mars 1875 à Morlaix, est un poète français. Il est né de l’union d’Édouard Corbière et d’Angélique Aspasie Puyo que 33 ans séparent : à sa naissance, son père est âgé de... [Lire la suite]
Pêcheur-Charpentier
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De la petite barque, il a sculpté les rames ;
Il enseigna l’amour aux hommes et aux femmes,
Ainsi qu’un grand poète, et c’est ma dette envers
Le fils du charpentier, à qui j’offre mes vers.
Il fut l’un des premiers à prier Notre Dame ;
Maître, on sait qu’il le fut, mais libre comme l’air,
Pêcheur de beaux poissons, et surtout pêcheur d’âmes,
Le fils du charpentier, qui a pour nous souffert.
Il ne s’est point logé dans un palais superbe,
Il allait aux jardins pour s’allonger dans l’herbe,
Et jamais le bon vin ne lui fut défendu.
Mon logis de vieillard abrite ses pensées,
Fleurs de sagesse antique autrefois ramassées ;
Elles ont la saveur du paradis perdu.
Bûcheron-sculpteur
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Quand il n’a pas de bûche, il tronçonne une rame ;
Je vois sa production, statues de belles femmes:
C’est un travail soigné, l’endroit comme l’envers,
Que j’aime célébrer au long de quelques vers.
Au curé de ces lieux, tu offris Notre Dame ;
Et pour moi tu sculptas, légère comme l’air,
Une muse aux grands yeux qui peut ravir mon âme,
Mais tu sais faire aussi de grands démons de fer.
Nous aimons visiter ton atelier superbe,
Entrer dans ton jardin pour déjeuner sur l’herbe,
Goûter de ton verger les fruits non défendus.
Je n’ai pas d’atelier, je sculpte des pensées,
Des fleurs à bon marché, n’importe où ramassées ;
Des fleurs, ou quelquefois un bout de bois tordu.