À mes chansons
Au Val-Bénit partez, fils de ma muse !
À peine éclos, c’est là qu’il faut aller ;
Partez sans moi, vous direz pour excuse :
« Il n’a pas, lui, d’ailes pour s’envoler. »Lisant Rousseau qu’aiment tous les poëtes,
Là, j’ai coulé peu de jours bien remplis ;
Mais sans remords j’ai quitté mes Charmettes ;
L’air en est pur, ma pervenche est un lis.Oh ! quel bonheur de revêtir la brume
Sur le coteau comme un linceul flottant,
Et de chercher à l’horizon qui fume,
Là-bas, là-bas, le toit qu’on aime tant ;Et de poursuivre aux champs, aux bois, sans terme,
Un papillon, un rêve, un feu follet,
Sûr de trouver, de retour à la ferme,
Un doux accueil, du pain blanc et du lait !Avec le pâtre au ravin j’allais boire.
M’inspirant là, pauvre et gai, j’y vécus ;
Fontaine aux vers, quel conte dérisoire
T’a fait nommer la fontaine aux écus ?Je n’eus jamais ce qu’a la boulangère ;
Mais quand l’amour me caressait alors,
S’il étreignait une bourse légère,
Il sentait battre un cœur plein de trésors.Trésors perdus ! la semence divine
Que j’étalais, vaniteux possesseur,
S’est envolée, et rien n’a pris racines,
Et cependant je lui disais : Ma sœur,Un beau laurier sur votre front d’ivoire
Remplacera la rose du buisson.
Je le disais et mon rêve de gloire
A, comme tout, fini par des chansons.Au Val-Bénit partez, fils de ma muse !
À peine éclos, c’est là qu’il faut aller ;
Partez sans moi, vous direz pour excuse :
« Il n’a pas, lui, d’ailes pour s’envoler. »
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Hégésippe MOREAU
Hégésippe Moreau est un écrivain, poète et journaliste français, né et mort à Paris (8 avril 1810 – 20 décembre 1838). Inscrit à l’état civil sous le nom de Pierre-Jacques Roulliot, il porte dès son enfance le nom de son père naturel et adopte le pseudonyme d’Hégésippe en publiant ses premiers vers à Paris en... [Lire la suite]
Marsupial et carnassier
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Lorsque le Kangourou avec le Lion s'amuse,
Vers le frais pâturage on les voit s'en aller ;
Eux, pour se divertir, n'ont pas besoin d'excuse,
Ils laissent leurs soucis au lointain s'envoler.
Déjà le grand soleil a dissipé la brume,
Déjà sont oubliés leurs grands rêves flottants ;
Un petit feu de bois au coin des pierres fume,
Ils pourront préparer le thé, qu'ils aiment tant.
Le berger sonne en son grand cor d'ivoire,
Accompagnant leur joyeuse chanson ;
Qu'est-il besoin de puissance ou de gloire ?
Faisons la sieste à l'ombre des buissons.
"Faisons plutôt la sieste"
Le berger sonne un air en son grand cor d'ivoire,
Accompagnant ainsi leur joyeuse chanson ;
Qu'est-il besoin pour eux de puissance ou de gloire ?
Faisons plutôt la sieste à l'ombre des buissons.