À Léon Gatayes
Avec ses sanglots, l’instrument rebelle,
Qui sent un pouvoir plus fort que le sien,
Donne l’harmonie enivrante et belle
Au musicien.Le cheval meurtri, qui saigne et qui pleure,
Cède au cavalier, rare parmi nous,
Dont aucun effort ne peut avant l’heure
Lasser les genoux.De même d’abord, le Rhythme farouche
Devant la Pensée écume d’horreur,
Et, pour se soustraire au dieu qui le touche,
Se cabre en fureur.Mais bientôt, léchant la main qui l’opprime,
Il marche en cadence, et comme par jeu,
Son vainqueur lui met le mors de la Rime
Dans sa bouche en feu.Tu le sais, ami, toi dont l’Art s’honore,
Homme à la main souple, au jarret d’acier,
Qui fais obéir la harpe sonore
Et l’ardent coursier ;Lorsque aimé d’Isis aux triples ceintures,
Un homme intrépide a baisé son sein,
La création et les créatures
Suivent son dessein.Le Génie en feu donne à l’âme altière
Le Commandement, ce charme vanté,
Et l’Esprit captif dans l’âpre Matière
Cède épouvanté.Mai 1855.
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Théodore de BANVILLE
Etienne Jean Baptiste Claude Théodore Faullain de Banville, né le 14 mars 1823 à Moulins (Allier) et mort le 13 mars 1891 à Paris, est un poète, dramaturge et critique français. Célèbre pour les « Odes funambulesques » et « les Exilés », il est surnommé « le poète du... [Lire la suite]
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