A la perverse Ophélie
Les évocations de ma froide folie
Raniment les reflets sur le marais stagnant
Où flotte ton regard, ô perverse Ophélie !C’est là que mes désirs te retrouvent, ceignant
D’iris bleus ton silence et ta mélancolie,
c’est là que les échos raillent en s’éloignant.L’eau morte a, dans la nuit, les langueurs des lagunes,
Et voici, dispensant l’agonie et l’amour,
L’automne aux cheveux roux mêlés de feuilles brunes.L’ombre suit lentement le lent départ du jour.
Comme un ressouvenir d’antiques infortunes,
Le vent râle, et la nuit prépare son retour.Je sonde le néant de ma froide folie.
T’ai-je noyée hier dans le marais stagnant
Où flotte ton regard, ô perverse Ophélie ?Ai-je erré, vers le soir, douloureuse, et ceignant
D’iris bleus ton silence et ta mélancolie,
Tandis que les échos raillent en s’éloignant ?L’eau calme a-t-elle encor les lueurs des lagunes,
Et vois-tu s’incliner sut ton défunt amour
L’automne aux cheveux roux mêlés de feuilles brunes ?Ai-je pleuré ta mort dans l’énigme du jour
Qui disparaît, chargé d’espoirs et d’infortunes ?…
– O rythme sans réveil, ô rire sans retour !
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Renée VIVIEN
Renée Vivien, née Pauline Mary Tarn le 11 juin 1877 à Londres et morte le 18 novembre 1909 à Paris, surnommée « Sapho 1900 », est une poétesse britannique de langue française du courant parnassien de la Belle Époque. Renée Vivien était la fille d’une mère américaine et d’un père britannique fortuné qui mourut en 1886,... [Lire la suite]
Fin d’Ophélie
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Muse à la voix blême,
Chante tes adieux
Dans les chrysanthèmes.
Chante pour les dieux
Du ciel d’amarante,
Mais pas pour mes yeux.
La nuit transparente
Transforme un tombeau
En chair fulgurante ;
Les astres sont beaux,
La lune est humaine
Autant qu’un corbeau.
Ton coeur se promène
Vers les eaux, là-bas,
Toute une semaine ;
Et je n’y vais pas.
Muse de romance
Cueille le jasmin
Dans le parc immense,
Au bord du chemin,
Au coeur des prairies,
Parfume tes mains
De ces fleurs meurtries ;
Tu n’as pas sommeil,
Chante l’insomnie,
Attends le soleil :
Sainte-Catherine
Te l’offre vermeil,
Ô muse chagrine.
Dieu des tourbières
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Ce dieu obscur et lourd fut l'amant d'Ophélie ;
La couronnant de fleurs et d'algues la ceignant,
Il avait su parler à sa mélancolie,
Mais ne dit plus un mot, ce jour, en s'éloignant.
Ophélie, s'immergeant, rêvera de lagunes,
Et de meurtre et d'angoisse, et de mort, et d'amour,
Sur l'eau de ce ruisseau flottent les feuilles brunes,
Pas un nuage au ciel, ce jour est un bon jour.
Un astre au firmament ne sait pas s'il est beau,
La lune n'entend rien des paroles humaines ;
Pour te dire un adieu, tu n'auras qu'un corbeau
Qui,sans penser à rien, dans les cieux se promène.